FILET CREOLE SEGA - MALOYA

Numéro d'inventaire : 1997.36.02
Auteur : SORET Didier
Date de création : 1994
Domaine : technique
Matière technique : Cartons découpés et fils de pêcheur translucides
Mesures :
Hauteur en cm : 150
Largeur en cm : 150

Description analytique : Didier Soret est à La Réunion. Il est titulaire d’un DNSAP de l'École Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris, d’un doctorat en Histoire de l’Université de La Réunion, et a obtenu récemment le CAPES d’histoire de l’art et la qualification aux fonctions de Maître de conférences. Il est actuellement professeur certifié d’arts plastiques au Collège Saint-Charles et intervenant à l’Université de La Réunion. Il a longtemps pratiqué la peinture, surtout à l’acrylique, qu’il fabriquait lui-même à base de pigments et de caparol (peinture respectueuse de l’environnement), inspiré notamment par le groupe COBRA. Il a ensuite peu à peu diversifié sa pratique, ses matériaux et ses techniques (papier découpé, aquarelles, collages, verre, mosaïque, fil de fer). Son travail s'engage désormais dans une démarche synthétisant installation, peinture, photographie et vidéo. Ses recherches s’axent dès le départ autour de la question de la créolité, prenant, au cours de ses dernières années un tournant écologique, avec une réflexion sur les changements climatiques qui provoquent des mutations de la flore et de la faune. Filet créole – séga maloya s’inscrit dans la continuité du travail de recherche présenté dans le cadre de son diplôme aux Beaux-Arts de Paris où il a installé, sur une surface de 400 m2, des petits danseurs de maloya en fil de fer, qu’il a fabriqués lui-même, les uns après les autres. Un parcours rigoureux et austère dans la répétition du geste et de la figure pendant 8 années, dans une œuvre très proche de la performance. Elle a été montrée lors de l’exposition « Toubo tounouvo » en 1997 à l’Artothèque, tout comme Orchidées : trois toiles sur châssis reliées entre elles par des bandes « épineuses » découpées dans de la tôle galvanisée. La thématique des fleurs est récurrente dans le travail de Didier Soret ; on la retrouve dans Eclosion et Pensée d’eau en 2005, diptyques grand format, qui proposent en très gros plans des images fascinantes et inhabituelles de la flore de l’île, que l’artiste part régulièrement explorer. Elles s’inscrivent dans la continuité de sa démarche concernant la révélation du patrimoine endémique de La Réunion et de toutes les mutations à venir suite aux changements climatiques et aux déséquilibres de l'environnement planétaire. Ce travail fait écho aux recherches en photographie, vidéo et infographie qu’il mène depuis 18 ans. Patricia de Bollivier, août 2011

Exposition :
Référence : Toubo tounouvo Artothèque de La Réunion 19/03/1997 30/04/1997
Date de début : 1997-03-19T05:39:21.000000Z
Date de fin : 1997-04-30T05:39:21.000000Z
Description : Le principe générateur de cette exposition est le retour dans l'île de jeunes diplômés d'écoles des Beaux-Arts de métropole. La présentation de leurs travaux au public entérine, - au bout du parcours « initiatique » que constitue leur apprentissage technique et intellectuel - leur entrée sur la scène artistique de l'île. Ces cinq jeunes « accostent » dans un contexte culturel quelque peu perturbé et qui ne laisse guère présager de lendemains qui chantent... Il y a quelques années, leurs prédécesseurs avaient regagné leur île natale dans des conditions plus clémentes. Les années 70, « période d’éveil » de l'expression culturelle réunionnaise, ont vu l'émergence de mouvements intellectuels militants, relayés, dans les années 80, par une action culturelle dynamique. La décentralisation, avec tout ce qu'elle apportait comme moyens financiers, a entraîné une véritable explosion en matière d'arts plastiques : mise en place d'équipements structurants de diffusion et de formation, développement du milieu associatif, aide à la création ... La conjoncture propice a vite transformé les nouveaux arrivants en « artistes officiels » (par le biais des commandes publiques, des expositions ...). Alain Séraphine, Jack Beng-Thi, Alain Padeau, François Giraud ... constituent aujourd'hui, avec des artistes autodidactes ayant atteint une notoriété certaine dans l'île - Gilbert Clain, Wilhiam Zitte, Éric Pongérard ... - une « caste de notables », selon l'expression d'un plasticien de la même génération1, dont on regrette « l’institutionnalisation » de la production. Celle-ci ne conçoit plus son développement hors du cadre institutionnel commandes, expositions ... Leurs cadets, eux, débutent leur carrière sous des auspices bien moins heureux. Comme le déclarait récemment un directeur de structure lors d'une émission de radio, « nous sommes en période d'avant-guerre », et les restrictions actuelles ne sont que les prémices d'une crise qui s'annonce bien plus grave que celle que nous vivons. Les obstacles qui se dressent aujourd'hui sur la voie des artistes professionnels sont nombreux:( ...) les coupes claires effectuées dans le budget « Culture » de l'Etat et des Collectivités, promettent, pour les années à venir, des batailles acharnées ... Joignons à cela la faiblesse des marchés intérieur et extérieur, l'absence de critique, l'isolement inhérent à la situation géographique et le manque de confrontation avec l’extérieur... Très peu d'artistes de l'île le sont à temps complet et peuvent prétendre vivre exclusivement de leur production. Certains travaillent dans l'Education Nationale (dans les lycées et collèges), d'autres se sont investis dans l'action culturelle (en tant que directeurs de structures notamment, dans des services culturels ou dans des projets d'insertion), d'autres encore exercent des métiers qui n'ont rien à voir avec leur pratique artistique, à laquelle ils s'adonnent pendant leur temps libre. Quatre de nos exposants sont en poste à La Réunion (trois dans l'enseignement, un dans un service culturel municipal). Le cinquième vit et travaille à Marseille. Willy Govin travaille essentiellement à partir du corps, qu'il révèle et cache par la photographie. Catherine Boyer convoque Éros dans le jeu délicat des matières et des formes : la dentelle est partout, qui habille et déshabille les morceaux de corps mou ; qui recouvre les surfaces de précieuses scarifications, invitations au toucher. Les petits trésors des mers par poignées, récolte de coquillages et de mollusques, fossilisent le geste patient de la dentellière. Jaimy Sing Cheong peint non pas des « paysages » mais du « paysage » et développe dans ses grandes toiles un rapport intime avec la nature, qu'il ne décrit ni ne montre, mais qu'il explore. Didier Soret, avec son filet humain, passe allègrement du régional à l'universel : il se mue en mécanique et reproduit à l'infini les formes uniques d'un couple de « maloyèrs », motif primordial que l'on oublie finalement, au profit de l'ensemble. Les espaces sonores de Guy Ajaguin avalent le spectateur pour une nouvelle écoute, une ballade dans son champ électroacoustique à travers la ville et chez lui. Cette exposition se veut un éloge du voyage. La conquête de l'Ailleurs et la confrontation à l'Autre doivent apporter une réponse radicale aux contradictions internes propres aux sociétés post-colo­niales : l'opposition entre « authenticité » et « influence culturelle », entre « tradition- identité » et « occident-modernité ». Les œuvres ici présentées permettent de poser différemment les termes du conflit : elles effectuent la synthèse plastique originale et actuelle entre deux cultures qu'il serait vain d'opposer éternellement. La création artistique réunionnaise ne se réalisera pleinement qu'au contact d'autres civilisations, notamment celles des pays alentour, proches non seulement géographiquement, mais surtout culturellement et viscéralement. Dans le contexte actuel de fermeture frileuse des frontières, il appartient à l'artiste de garantir la libre circulation des idées et des œuvres. Pour reprendre l'expression de Laurent Segelstein : « Kréols deor !»2 ... « l’artiste réunionnais doit se donner les possibilités de créer hors de son jardin ». On voudrait voir son champ d'interventions prendre des dimensions planétaires, et indianocéaniques pour commencer. « Dehors est un grand pays », écrit le poète3, ses frontières ne sont pas celles de l'Occident. « Kréols deor !», pour se nourrir de l'Ailleurs et de l'Autre, au cours d'une transhumance salutaire. « Kréols deor », pour poser son regard sur le Monde et ce qui s'y passe, pour s'y impliquer et en être citoyen ... L'urgence est au voyage, donc, mais avec en tête les paroles du sage : le voyage qui est fuite de soi n'aboutit jamais. Patricia de Bollivier Extrait du catalogue « Toubo Tounouvo », 1997 1 : A. du Vignaux, « Téléphone sonne : l'art contemporain à La Réunion », RFO Radio, le 10 septembre 1996, 18h. 2 : Laurent Segelstein, « Quand la nuit s’avance », RFO radio, le 10/2/97, 19h. 3 : Alain Lorraine, 1995.


Mots clés :
représentation non figurative - PERSONNAGE - AGE ET SEXE - ETRE HUMAIN - ANATOMIE - SCIENCES PURES -