AU MEME MOMENT

Numéro d'inventaire : 2007.15.01
Auteur : AFXENDIO Samantha
Date de création : 2006
Domaine : audiovisuel
Matière technique : Vidéogramme
Mesures :
Durée en mm : 5,52
Description analytique : Samantha Afxendio est née à Madagascar. Elle a commencé ses études artistiques à l'école des beaux-arts et des métiers artistiques du Port, puis a effectué un second cycle d'études à l'école supérieure des beaux-arts de Caen, en métropole. Elle a principalement exposé son travail à Paris et à la Réunion, lors d'expositions individuelles ou de groupe. Certains pourront se souvenir de son importante exposition "Métronome" à l'Artothèque du département de la Réunion, au printemps 2007. Elle est l'auteur d'une commande publique d'État à la Bibliothèque Universitaire du Tampon. Ses œuvres sont présentes dans plusieurs collections publiques et privées. Elle est certainement la figure artistique réunionnaise la plus importante de sa génération. " Je considère mes dessins comme les fragments d'un flux permanent de paroles et de commentaires dessinés ". L'œuvre de Samantha Afxendio est portée par le dessin qui pour elle a été le moyen de transformer "du temps vécu en espace". Dessinatrice au quotidien, Samantha Afxendio considérait son rapport au dessin comme un fil sans fin, improvisé et illimité. C'est une suite d'expérimentations de matières qu'elle nous offre, une superposition de techniques qui forme des images très actuelles et immédiates avec l'idée d'une grande mixité qui a donné naissance, à une (son) écriture à part entière. La rencontre sur une même feuille de ces éléments graphiques organisés de façon physique et concrète, par des vides et des pleins, par des formes, des couleurs et des lumières, cristallise une beauté, forte et violente, pleine de poésie. D'une étrange manière ce sont plusieurs régimes de sensations et de sentiments qui sont convoqués et qui cohabitent dans chaque dessin. Samantha Afxendio était profondément attachée à l'île de la Réunion, elle organisait son travail par des formes d'aller et retour, de la Réunion à Paris, de Paris à l'île de la Réunion. Conjointement au dessin, Samantha Afxendio écrivait beaucoup, particulièrement des notes d'atelier ou des textes sur son travail : " C'est une construction personnelle, très personnelle, proche d'un journal intime, portée par un quotidien qui se traverse de temps différents, de régimes et d'espaces différents, obsessionnels... mes obsessions qui naviguent dans un documentaire, une forme de documentaire, si je peux l'évoquer ainsi, dire un quotidien constitué d'expériences d'une matière physique, avec moi, malgré moi. Je construis mon travail, avec l'anecdotique, l'obsessionnel, le factuel, le sentimental, l'impossible, les travaux ne sont jamais terminés, ce sont des palimpsestes, des œuvres qui se mettent en relation avec d'autres œuvres, d'autres couches inférieures de ma vie, qui transparaissent en filigrane. J'y dessine aussi des fragments de corps, j'y figure des formes revenantes. " Hypersensible aux évènements et aux personnes qui l'entourent, Samantha Afxendio a produit des œuvres chargées tout à la fois de violences et de rêves. Les dessins racontent une histoire, ils sont faits d'accidents et de tensions. Ils nous lient avec son quotidien, avec de l'anecdotique, mais aussi avec des formes empruntées à l'actualité, à la géographie, au développement économique et à la transformation des paysages, à la détresse et à la violence humaine, aux chocs des villes, à la démesure beauté du paysage réunionnais et bien sûr à l'infinie dimension intime de l'artiste. Les neuf œuvres de Samantha Afxendio présentent dans les collections de l'Artothèque du département, constituent un ensemble significatif et complet. Les dessins et les photographies vous laissent seuls avec vous-même, face à l'étrange beauté des images, au désir d'en décrypter le sens, les mots. Sa vidéo de 2006, "Au même moment", apparaît, elle en miroir des dessins. Elle nous ouvre par la structure de son montage, à cet aller et retour incessant que faisait l'artiste entre l'extérieur d'elle-même, son île - Paris - la ville et l'acte du dessin dans l'intimité de l'atelier, nous donnant à voir par moments, ses mains qui dessinent sur le papier et font évoluer une œuvre. L'incessante brisure temporelle et formelle du montage des plans de cette vidéo, les changements d'espaces géographiques, la brutalité de la bande son, nous projettent au cœur de Samantha, dans l'essence de son vécu, à la fabrique de ses dessins. Samantha Afxendio a été influencé par plusieurs groupes rock, rock alternatif, new wave et post-punk et la musique avait une place importante dans sa vie et dans son œuvre. Vous retrouverez d'ailleurs certaines de ses œuvres, titrées en références à des œuvres musicales. Elle avait cette capacité à capter des informations indicibles et de les restituer dans son art. "Je suis venue en France pour finir mes études, pour « désot le mèr », traverser la mer… Mes premiers émois artistiques, je les ai éprouvés à la Réunion, en écoutant les textes des chansons de Daniel Waro et les poésies de Boris Gamaleya. Je dessine depuis toute petite, mais ces artistes m'ont donné l'envie de créer et de m'inspirer du pays." Jean-Jacques PASSERA, novembre 2012

Exposition :
Référence : Métronome Artothèque de La Réunion 14/04/2007 10/06/2007
Date de début : 2007-04-14T05:39:50.000000Z
Date de fin : 2007-06-10T05:39:50.000000Z
Description : Peinture et musique se mêlent indissociablement au processus créatif de Samantha Afxendio. Ses créations plastiques sont rythmées par la musique ; cet art du temps que le métronome symbolise parfaitement. Le temps et l’espace, à travers les deux dimensions de la peinture, sont les «lieux» où se forgent les œuvres de l’artiste. Une œuvre un peu déjantée et chaotique où la violence n’exclue pas la poésie, le romantique, le goût du mystère et du fantastique, la sensualité et l’éclatement des contrastes dans les formes d’expression. Les séries de dessins ou de photographies tout comme la vidéo sont un ensemble cohérent et uni par la force du graphisme et ce rythme omniprésent, entendu ou manifesté. Les jeux d’encre et lavis se superposent, se fondent, s’évanouissent pour ressurgir en formes abstraites ou figuratives, ou tout à la fois mêlées, sur apposées. Ces transformations et surimpressions déclenchent des réactions dans lesquelles les traitements les plus doux virent au cauchemar ou encore donnent vie à des créatures fictives et autres bestioles imaginaires qui affectent une délicate et délicieuse légèreté. Au coeur de cet univers onirique et délirant, les formes étranges se meuvent à la fois glissantes et ondulantes et parfois abruptes, nerveuses et cinglantes sous une plume guerrière, mais toujours dans une vive spontanéité et une grande liberté qui évoquent immédiatement cette «délivrance» de l’artiste, délivrance d’un esprit complexe, complet. Les entrelacs et enchevêtrements d‘animaux ou d’objets précieux, les réseaux de dentelles dessinent des textures raffinées et sensuelles mais aussi mystérieuses telles des figures de l’infini, l’entrecroisement des chemins d’un labyrinthe qui conduirait à l’intérieur de soi en empruntant les dédales, les aléas, les circonvolutions de la pensée profonde. Tout est ici vibration en quête des richesses d’un monde phénoménal en mouvement dans chaque geste pictural. La rapidité d’exécution signale l’urgence vitale et bien sûr un rapport de l’être au temps et à sa propre existence marqué par l’intensité et la conscience de la vie dans un désordre raisonné avide de chaque instant que l’on retrouve en musique dans le jazz de Coltrane ou dans le rock, hard et concis. Cette existence qui se tient en équilibre dans le présent fait face au temps linéaire qui s’égraine en pointillé, en fines perles. Il ponctue régulièrement les créations graphiques, photographiques ou vidéographiques. Cet autre aspect du temps, répétitif et réversible comme celui du sablier souligne une part d’obsessionnel et de fébrilité en partie hallucinatoire. Les phénomènes de transes chamaniques sont aujourd’hui étudiés et mettent en évidence les circonstances et les étapes de ces périples hors du temps que sont ces expériences universelles et connues à toutes les époques et en tous lieux. Les sons obsédants des tambours, les chants fortement rythmés, les privations sensorielles et, en bref, tout ce qui éloigne de la réalité favorisent ces visions qui débutent par des nuages de points, des zigzags, des lignes concentriques ou rayonnantes, puis, ces signes s’organisent ; les zigzags deviennent des serpents... et enfin l’ultime étape débouche sur l’autre monde, celui de la communication avec les esprits, un monde de lumière. Dans le travail de Samantha Afxendio cette lumière est une vraie joie de la couleur, une belle sensibilité des nuances colorées des plus douces aux plus vives, un sens certain des tonalités et de leurs résonances. Un magnifique voile de lumière aux teintes exquises, féeriques recouvre et s’infiltre dans la trame d’un graphisme acéré et sombre qui porte un cri, une angoisse existentielle. En somme tout dans cette œuvre porte le poids de la condition humaine et sa dualité inhérente faite de luttes intérieures entre le clair et l’obscur, l’ordre et le désordre. Sa démarche picturale est, de toute évidence, imprégnée de culture rock par son mouvement rapide, lancinant et violent que soutient une mélodie aux accents romantiques et sensuels. Le précieux et l’horreur se côtoient, toutes les ambivalences de la pensée se confrontent et se mêlent marquant ainsi ses créations du sceau de la complexité humaine où un parfum de détachement, d’humour et de dérision s’affirme comme une note conductrice et continue. Sa liberté d’expression se conjugue avec les fanzines, mais on retrouve la fraîcheur, le merveilleux et la magie d’Hundertwasser, la mélancolie, le trait nerveux et énergique de Basquiat mais surtout une filiation caractérisée avec cet artiste complet et hors normes, plasticien, poète et musicien qu’est Mike Kelley. Caroline de Fondaumière, Historienne de l'Art, In catalogue Métronome


Mots clés :
PEINTURE -